Territoire : Auvergne-Rhône-Alpes


« L’Auvergne est la région qui m’a vu naître et où j’ai vécu jusqu’à l’âge de 11 ans. Nous habitions à Chamalières. Je me souviens des balades du dimanche dans la 203 noire de mon père dont j’ai gardé en mémoire l’immatriculation : 371 AK 63. Il y avait le puy de Dôme, avec son sommet arrondi qui semblait porter le poids des années. Il y avait aussi tous ces lacs merveilleux où nous allions pique-niquer, et puis le Mont-Dore, La Bourboule, Saint-Nectaire – d’autres lieux du dimanche qui me paraissaient très éloignés, chaque déplacement étant ressenti comme un voyage lointain. L’Auvergne, en zone libre, fut aussi le refuge de mes parents et de mes grands-parents pendant la Seconde Guerre mondiale. Refuge éphémère puisque la déportation rattrapa ces derniers. Pour eux un voyage sans retour. Pour moi une histoire de vie, de mort. Une histoire d’une certaine France, celle de mon enfance. »

© Léo Keler
© Léo Keler

Né en France en 1945. Vit à Paris. Alain Keler débute chez Sygma et Gamma puis cofonde Odyssey images en 1989. Depuis les années 1980, il a couvert les conflits au Liban, en Tchétchénie, en Israël et en Palestine, la révolution en Iran, la guerre civile au Salvador. Il est lauréat en 1986 du grand prix Paris Match du photojournalisme pour « Éthiopie sous la pluie » et du World Press Photo. Il a aussi travaillé sur les minorités dans l’ex-bloc communiste (prix W. Eugene Smith) et sur la discrimination des Roms en Europe. Il a publié plusieurs ouvrages et est membre de l’agence Myop.

 

 

 


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Journal de bord

Les modestes textes de mon journal de bord essayeront de raconter le déroulé et les raisons de ce travail.

MARS 2022


Mardi 8 mars 2022


Batz - Néris les Bains, dans l’Allier. La situation en Ukraine me prend la tête grave. Y aller, pas question maintenant. Il y a l’Auvergne et mon traitement médical. J'ai calculé qu'entre deux soins j'aurais neuf jours. Alors la frontière polonaise me paraît faisable.
L’hôtel, tenu par un couple de jeunes, me donne l’impression de me retrouver dans une machine à remonter le temps.
Andouillettes frites au dîner, deux verres de vin rouge du Languedoc. Un peu pété au moment de rejoindre ma chambre.

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Parking. Mardi 8 mars. ©Alain Keler

Mercredi 9 mars 2022


Photos de Néris –les-Bains. Les thermes, la place de la République photographiée depuis ma chambre, une rue avec la mairie qui ressemble à la tour de la gare de Lyon à Paris. Je demande à rencontrer le maire. Il refuse de me recevoir. De toute manière je n’avais pas prévu de halte dans cette petite station thermale.
À une vingtaine de kilomètres l’étang de Montmazot. Première vraie halte de mon travail. Il y a la maison de Madame Conchon où j’allais tout petit, je ne devais pas avoir dix ans. Je téléphone à Pascal, un de ses petits-fils qui parle au voisin, histoire de m’identifier.
L’étang me paraît tout petit, en fait il était grand quand j’étais tout petit enfant.
Je continue sur Montaigut en Combraille, à quatre kilomètres. Dans la grande rue, qui est toute petite et étroite, tous les commerces sont fermés, ou presque. Ça fait ville sinistrée. C’est dans cette rue que nous allions à pied de l’étang avec Madame Conchon pour m’acheter Tarzan. Et sans doute d’autres choses.
Direction Saint-Éloy-les-Mines où j’ai réservé un hôtel, sur les conseils du Maire de Montaigut. J’ai rendez-vous avec lui demain matin à neuf heures.
Je me retrouve seul à l’hôtel, ou presque. Dans la salle à manger seules quatre tables seront occupées. Si dans ce début de voyage il y a l’excitation de la découverte, ou redécouverte de lieux oubliés dans le temps, se retrouver dans une chambre d’hôtel seul c’est plutôt démoralisant. Et quand je dis seul, c’est seul, avec ce silence d’endroit vide et triste.
Heureusement ce soir il y a PSG Madrid, que je pourrais regarder sur mon ordinateur, histoire de redonner le moral à un photographe seul dans sa chambre triste, si Paris avec un but d’avance se qualifie.
Tout le monde, et quand je dis tout le monde, c’est le monde entier qui connaît la fin de l’histoire. Le PSG a été éliminé par une meilleure équipe. Quel début de voyage. Si on ne peut plus compter sur des vedettes millionnaires pour donner la pêche au photographe solitaire que je suis. Où va le monde. Les mauvaises nouvelles s’accumulent !


Vendredi 11 mars 2022


Il y a un rassemblement public sur la place de la mairie de St-Éloy pour le départ de trois camionnettes remplies de couvertures pour les réfugiés ukrainiens en Pologne. Après un discours, Anthony Palermo le jeune maire prendra le volant d’une des camionnettes pour un voyage d’une quinzaine d’heures sans arrêts.
Vallée de la Sioule, Un vent très fort souffle sur la région. Un arbre déraciné est couché sur les trois-quarts de la chaussée.
Cimetière de Gannat pour essayer de trouver la tombe de mon oncle, Joseph. Un fou d’après ma mère, ce que mon père n’a jamais contredit.
Monteignet sur l’Andelot, dans l’Allier. Je ne vois pas de centre. À la mairie tous les volets sont fermés. Deux drapeaux français flottent très fort à cause du vent sur la façade.
Trouvé un café dans un bourg voisin.
Après-midi avec Fabien Cartoux, le maire de Monteignet. Il a la quarantaine, est éleveur. Très sympa. Je le photographie devant la mairie, puis nous allons à la rencontre de ses vaches. « On ne s’engueule pas avec les vaches », dit-il. Elles sont surprises de voir un inconnu, en plus avec un appareil photo, et hésitent avant de se diriger vers les bacs que Fabien va remplir de granulés.

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Vendredi 11 mars. ©Alain Keler

Samedi 12 mars 2022


Montaigut fête la sainte Barbe des pompiers. Sortie de la grande échelle, photo souvenir avec Monsieur le maire et des pompiers devant le camion, puis défilé en partant de la place de la mairie vers la salle des fêtes, avec au centre  la fanfare. J’ai toujours aimé les fanfares depuis mon plus jeune âge. Cette musique me mets de bonne humeur, avec ses personnages qui la compose, ses percussions, parfois des mauvaises notes  vite oubliées. Salle des fêtes. Discours, dont celui du maire, Mr Jean-Marc Sautereau, de la député de Riom, des tas de décorations, musique de nouveau, collation, sourires dont ceux un peu timides de personnes photographiées dans le groupe de sapeurs. Bonne ambiance, beaucoup de monde.
Le restaurant de mon hôtel est fermé ce samedi soir. Je vais dans le seul ouvert de Saint Éloy. Peu de monde. C’est quand même un peu triste une petite ville de province en hiver, et le samedi soir !
J’essaie généralement d’éviter de montrer dans ce journal deux photos du même sujet ou d’un même événement en même temps. Je l’ai tellement vu dans des magazines qui croyaient en insistant lourdement  que ces parutions mettaient en valeur leur sujet, alors que je pense que cela ne faisait que l’affaiblir, par cette insistance qui ne finirait qu’à ne convaincre personne, médiocrité du traitement de l’information qui a contribué à la discréditer : lourdeur contre finesse. Je le fais parfois comme avec des images de souvenirs personnels, mais le propos est différent. Trop de photos ne tuent-elles pas la photo ?
Hier je publiais la photo du maire de Montaigut en Combraille posant au milieu des pompiers de la petite ville, une photo peut-être un peu à l’ancienne, quand poser pour le photographe était un honneur, ce qui n’est plus forcement le cas aujourd’hui. Cette scène fut suivie d’un défilé menant à la caserne des pompiers, défilé que je suivais en prenant des photos comme l’aurait fait peut-être un correspondant local, peut-être pas conscient que ces photos d’un quotidien à priori « banal » sont des photos décrivant la vraie vie de ces lieux un peu retirés du monde et qui se battent pour exister économiquement, pour exister tout court, tentant de survivre grâce à des hommes comme ce maire, par ailleurs ouvrier dans une usine qui, par ses emplois a sans doute permis d’éviter une descente aux enfers de cette localité.
Bref, tout cela pour vous dire que non seulement je raffole de cette démocratie locale, sans doute la plus vraie, la plus sincère, mais aussi de ses habitants qui se battent à leur manière pour que leur monde ne sombre pas avant la fin de notre monde.
Le défilé nous mena à la salle des fêtes avec des discours, des décorations et…de la musique de fanfare, et c’est là ou je voulais en venir. J’écrivais hier : « défilé en partant de la place de la mairie vers la salle des fêtes, avec au centre  la fanfare. J’ai toujours aimé les fanfares depuis mon plus jeune âge. Cette musique me mets de bonne humeur, avec ses personnages qui la compose, ses percussions, parfois des mauvaises notes vite oubliées »
 Mais aujourd’hui, même si l’on a l’impression que la fanfare est joyeuse, je la trouve souvent triste, essayant de cacher cette tristesse en se donnant des airs de fête. C’est mon ressenti en écoutant cette musique belle et triste à la fois.

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Samedi 12 mars. ©Alain Keler.
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Samedi 12 mars. ©Alain Keler.

Lundi 14 mars 2022


Saint-Genès-la –Tourette. Avec Henri, mon plus vieux copain, le frère que je n’ai jamais eu, nos parents nous envoyaient en vacances dans la ferme des Rousselle, Georgette et Jean. Encore des souvenirs. J’ai retrouvé une photo datée d’août 1954. J’y suis avec Henri, Colette, Annie, et Pito (Michel).
Je rencontre la maire de Saint-Genès, Odile Gilbert qui m’emmène à sa ferme, puis l’ancien maire Pierre-Luc Fraisse.
Démocratie locale, loin des instances des partis politiques, souvent étrangers aux préoccupations de ces maires de terrain.
Photos de vaches. Je commence à apprécier ces animaux curieux : leur mode de fonctionnement est le même partout : d’abord la surprise de celui qui vient d’ailleurs, puis la curiosité qui l’emporte. Elles suivent l’inconnu, s’arrêtent lorsqu’il s’arrête et se retourne, le fixent sans bouger, pour continuer ensuite ce manège qui semble les amuser, ou au moins les intriguer.
Direction Le Mont-Dore. Mon Tom Tom me fait faire un grand détour, si bien que j’aborde la dernière partie de la route de nuit. Elle est très sinueuse, il pleut, je suis la seule voiture, je ne vois pas grand-chose si ce n’est la neige qui semble recouvrir les pentes des montagnes. Je me dis que si j’ai un problème, je suis bon pour passer la nuit dans la voiture, ou dans un fossé.
Le Mont-Dore finalement, hôtel et dîner.
Tous les soirs j’essaie d’écrire mes notes, de développer ma moisson de photos du jour, de faire des prés choix, histoire de me rassurer, le tout avant une nuit en principe réparatrice.
À la télé, à la radio il n’y en a que pour l’Ukraine, et je ne peux pas y aller.

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Veau. Lundi 11 mars. ©Alain Keler


Mardi 15 mars 2022


Le Puy de Sancy. Quelques skieurs, de la neige, du vent, quelques photos comme pour dire que je suis passé par là et que je suis bien!
J’ai programmé pour aujourd’hui d’aller aux lacs Chambon, Pavin et d’Aydat, ces noms si familiers de mon enfance. Pas grand monde quel que soit l’endroit. Le col du Puy de Barbier, un paysage dénudé et beau. Acheté du fromage à Saint-Nectaire, la Rome des fromages, au moins pour mon père. Retour à Saint-Genès la Tourette pour une photo oubliée. Beaucoup de kilomètres, peu de photos mais ce n’est pas grave, je photographie sans contrainte et c’est cela l’important !

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Montagne. Mardi 15 mars. ©Alain Keler.

 

AVRIL 2022

Samedi 9 avril 2022


Parking Paris. Pneu crevé. Aide des agents de la sécurité du parking pour me changer la roue. Ça m’a contrarié, je n’aurais pas pu la changer seul. C’est bête comme début de voyage. Route vers l’Auvergne. Il grêle dur à la sortie de l’autoroute. Saint-Eloy les mines, hôtel dont je suis toujours l’un des seuls clients. Place de la mairie, pas de fête de la bière, personne. Je finis par la trouver à la sortie de la ville, près d’un plan d’eau.
La fanfare est bien là, avec le maire de Montaigut à la trompette. Peu de monde, quelques guinguettes où l’on sert … de la bière ! Petits grêlons.
C’est un peu triste. Retour du soleil, mais cela ne suffit pas à rendre la fête gaie.
Un homme me voyant prendre des photos me conseille d’aller un peu plus tard au stade où va se jouer un match de foot.
Nord Combraille affronte le club de Châtelguyon, en départementale 2. Une quinzaine de spectateurs, mais en même temps à Clermont-Ferrand, Clermont foot affronte le PSG en championnat de France, première division.
La nuit tombe, les projecteurs éclairent le terrain où 22 joueurs se disputent le ballon. Très vite, les visiteurs dominent. Je ne resterais pas jusqu’à la fin.
À Saint-Eloy le seul restaurant correct est privatisé pour la soirée. J’atterris dans une espèce de kebab avec quelques tables. Je prends la dernière. Il y a des mères avec leurs enfants, quelques jeunes qui viennent commander à l’entrée. Je choisis un kebab frites. J’adore les kebab, et les frites, n’en parlons pas. Mais ce soir la sauce blanche maison que l’on m’a servie était assez dégueulasse, et pour la première fois depuis sans doute des décennies je n’ai pas pu finir mon plat que j’ai quand même immortalisé par une photo qui ne gagnera sans doute jamais le Pulizer!
O’Crosby qu’il s’appelle ce fast food.

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Foot. Samedi 9 avril. ©Alain Keler.


Dimanche 10 avril 2022


Nous sommes deux dans la salle de restaurant de l’hôtel pour le petit déjeuner.
Il fait soleil, encore un peu froid. J’ai travaillé un peu mes images hier soir en guise de soirée après mon horrible dîner, « terribilis prandum ». Il est 08h40 dehors la lumière est forte. Il faut y aller.
Petite route, la départementale 998, Lalizolle. Mairie de Monteignet l’Andelot. Jour de vote pour le premier tour de l’élection présidentielle. Pas trop de monde encore. La lumière dans la salle de vote de la mairie est magnifique, comme une ode à la démocratie, en espérant que c’est elle qui sortira vainqueur. J’ai déjà photographié Fabien Cartoux, le jeune maire de cette commune.
 Il m’annonce que des inscriptions à la gloire d’Adolph Hitler ont été taguées devant la mairie d’Escuriolles, à trois kilomètres d’ici.
Demain dans votre journal préféré, la suite et la photo du tag nazi d’Escuriolles.

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Dimanche 10 avril. ©Alain Keler.


Mercredi 13 avril 2022


Pour ma pension j’ai tout faux. Le patron est très sympa. Lui et sa femme viennent du nord. Comme quoi les premières impressions ne sont pas toujours bonnes. « chez tante Soly » se trouve dans ce qui a été une ancienne pension d’enfants qui a accueilli  et protégé des enfants juifs pendant la guerre. L’histoire de cette petite ville est singulière*.


« En plus de la quarantaine de médailles de « Justes parmi les nations » attribuées individuellement aux habitants, en 1990, le gouvernement israélien avec l’Institut Yad Vashem de Jérusalem honore le Chambon-sur-Lignon et les communes avoisinantes. Il décerne un diplôme d’honneur collectivement « aux habitants du Chambon-sur-Lignon et des communes voisines qui se sont portés à l’aide des Juifs durant l’occupation allemande, et les ont sauvés de la déportation et de la mort »


La journée s’annonce longue avec pas grand-chose à faire, en dehors de l’invitation à déjeuner du maire, Mr Jean-Michel Eyraud. Je photographie les lieux de mémoire, mais en cette saison ils sont vides d’humains et aujourd’hui la lumière est grise.
Le lieu de mémoire de la fondation de la Shoah montre des photos et films de réfugiés pendant la seconde guerre mondiale, l’exode comme les ukrainiens qui vont en Pologne.
Déjeuner avec le maire du Chambon et Mme Denise Vallat, son adjointe et en charge de la culture. Ensuite il me fait faire un tour des hameaux qui constituent Le Chambon et qui sont beaucoup plus beaux que le centre-ville. Ces hameaux expliquent comment on a pu cacher de tout temps des réfugiés et des juifs pendant l’occupation allemande. Le maire, protestant, sa femme de confession juive rencontrée à l’université, a eu dans sa famille des justes, dont son grand père. J’ai été très touché par ses explications, sa vision humaniste du monde, émouvante, son regard, son humanité.
Je ne peux m’empêcher de penser à ma famille. Ils n’ont pas eu la chance de rencontrer des justes comme au Chambon.
Le soir photo du maire de Sainte Sigolène et du conseil municipal, avec Ludovic A. Ludovic est enseignant à Sainte Sigolène et photographe amateur. Avec un collègue professeur d’arts plastiques, il a créé une association pour mettre en avant le travail de leurs élèves en photographie argentique, sérigraphie et gravure. C’est lui qui m’a parlé de la procession des pénitents blancs  qui se déroulera ce vendredi, saint par son appellation ! Il m’a aussi mis en contact avec le maire. Ce soir je l’ai photographié avec son écharpe tricolore, entouré du conseil municipal. J’essaie de faire cette photo partout où je passe, démocratie locale oblige. Je reste un peu au début de la réunion puis Ludovic m’emmène dans un restaurant et bar à vin à Minestrol, le « Kitch’n » tenu par des femmes. Un verre, deux verres et je m’arrête car mes soirées sont plutôt consacrées à développer mon travail de la journée. J’utilise toujours ce terme, même pour le numérique. Développer = découvrir. Afficher, projeter, révéler, étaler, montrer sont des synonymes.
Hôtel à Monistrol sur Loire. Le Corsy est plutôt un bar restaurant avec quelques chambres. La mienne, numéro zéro donne sur la rue principale. La tenancière me garantit qu’elle sera calme. Après 20.00 heures, dire qu’il n’y a pas grand monde dans la rue est un euphémisme, il n’y a personne dehors, ou presque.

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Mercredi 10 avril. ©Alain Keler.


Jeudi 14 avril 2022


Mon petit déjeuner : deux cafés, petite dose dans une grande tasse. Je demande à faire mousser du lait à part, genre capuccino fait maison. Sauf que presque partout les préposés au petit déjeuner n’y arrivent pas, pour deux raisons : la première c’est que ça les embête de passer trop de temps à faire cette opération, la seconde c’est que le lait à leur disposition est demi écrémé et que ça ne mousse pas. Je sais tout cela, mais je continue à demander. Il faut toujours demander pour essayer d’obtenir quelque chose, lait mousseux ou autre.
Je vais retraverser la Haute Loire pour retourner à Ars les Favets photographier un couple d’éleveurs de bovins rencontré l’autre jour. Je dormirai à Montluçon, à côté d’un laboratoire médical, analyse hebdo oblige.
C’est le chemin des écoliers que j’emprunterai. J’aime aussi trainer, même en voiture, m’arrêter souvent, photographier même si l’immense majorité de ces photos ne servira pas à grand-chose, ce seront des miettes qui me permettront de garder mes traces de voyage comme un petit poucet qui veut se souvenir de sa route.
Et ma route a été longue depuis ma jeunesse auvergnate.
Premier arrêt à Craponne sur Arzon, ravitaillement en carburant E85 pour ma voiture. Il n’y a pas beaucoup de ces stations sur les petites routes, donc ça vaut le détour, et le E85 est un carburant propre et pollue beaucoup moins que l’essence normale ou le diesel.
Georges de la Loire, petits arrêts. Beaucoup d’hôtels ou commerces fermés. Je suis loin de tout. J’aime et en même temps cela m’effraie. Si j’habitais dans ces petits endroits j’aurais peur de m’ennuyer. Je suis un vrai parisien.
Hôtel à Montluçon, dans la zone industrielle. Il y a deux autres clients. Les propriétaires me racontent qu’un incendie à côté de l’hôtel a été provoqué pour une histoire sordide d’assurance. L’hôtel a dû fermer plusieurs mois. Le dîner est très convenable, le vin n’est pas mauvais. En prenant une soirée étape, le séjour est beaucoup moins cher. Je me sens représentant de commerce, comme le fut mon oncle Charles il y a longtemps.

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Jeudi 14 avril. ©Alain Keler.

MAI 2022

Vendredi 27 mai 2022


Route vers Allanche, dans le Cantal. Paysage de toute beauté en arrivant. Montagnes volcaniques sombres, pâturages.
Village en ébullition, c’est la fête de l’Estive. Je reprends les informations du tourisme local, c’est plus direct : « Cette fête incontournable met en valeur des traditions locales dont la transhumance des troupeaux de vaches Salers vers les estives. Montées et défilés de troupeaux, marché et présentation des produits du terroir, repas et autres animations de rue ». Tout est dit. Reste plus qu’à photographier !
Le maire que j’avais contacté avant de venir me fait faire un petit tour. Je le photographie et il aime ça ! Je lui raconte que le président des festivités, que j’avais joint au téléphone, m’avait formellement interdit de photographier le bal du samedi soir.  "Vous pourrez photographier, me dit-il en m’invitant au dîner du lendemain soir. Personne ne pourra vous empêcher de faire des photos".

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Vendredi 27 mai. ©Alain Keler.


Samedi 28 mai 2022


À huit heures je suis devant la mairie, RDV avec le maire.
La fête se prépare, les étales s’installent, la musique bal musette-accordéon retentit. J’aime ça. Il fait encore frais, Allanche est à 980 mètres d’altitude. On sent que le soleil est prêt à se montrer.
08h40, le maire se fait attendre, je suppose qu’aujourd’hui il a d’autres chats à fouetter. Je me réfugie au café qui jouxte la mairie.
Finalement c’est à pied que je me rends à Maillargues, à un kilomètre, c’est là que l’on bénit les troupeaux avant leur montée à l’estive.
Prêtre, discours, monde, tout est bien sauf la lumière un peu compliquée, dure, contre-jour…
Bénédiction des vaches salers en sachant que plus tard on les mangera. Est-ce que cela fera de nous aussi des saints ? J’ai déjà été béni une fois par le nouveau pape Jean-Paul II à Rome le jour de son élection en 1978. Mais Rome c’est loin, 1978 aussi. Je ne me sens pas plus Saint qu’un vrai Saint, mais j’espère rester sain, et puis ne dit-on pas qu’il vaut mieux s’adresser au bon Dieu qu’à ses saints. Saints, pas seins, c’est interdit sur Facebook !
Retour à Allanche. Spectacles et musique dans les rues, ou plutôt dans la rue principale et la place centrale.
Défilés de vaches.
Tout va très bien, marche, photos et soudain un vide. Le moral passe de +1 à -1. Fatigue, lassitude, trop de vaches ?
Je ne suis pas là pour me poser des questions existentielles, mais pour photographier sauf que souvent les deux marchent ensemble.
D’un seul coup, après cet interlude, la machine reprend sa marche, les questions on doit se les poser plus tard, le soir lorsque l’on se sent seul !
Rencontre avec un groupe de bourrée, mais pas bourrés, musique typiquement auvergnate.
Repas de clôture à la table du maire. Bal le soir. Photos OK, personne pour m’interdire.


Dimanche 29 mai 2022


Aujourd’hui c’est la montée aux estives. À pied, pour faire des photos. Mais quand on dit « montée », c’est bien une montée. Elle fera dix kilomètres.
J’écris un peu en m’arrêtant pour reprendre mon souffle.
Monter, monter, monter. J’ai l’impression que je n’y arriverais jamais. L’idée était de photographier les vaches, mais elles vont trop vite pour moi. Par moment je recolle au peloton, un peu comme au tour de France, puis ça repart. Une petite halte à Pradiers, à mi-parcours. Ravitaillement offert par des habitants, groupe de musique, danses, instruments de musique bizarres. Le maire chante « que la montagne est belle » de Jean Ferrat. J’en ai des frissons. La montagne est belle, la région est belle, les gens présents aujourd’hui sont beaux. C’est jour de fête.
Et ça repart. Retard à l’allumage, passé trop de temps à photographier les musiciens, les vaches ont déjà de l’avance sur moi.
Je suis, donc j’existe !
Un regroupement se fait avec un arrêt avant l’assaut final vers l’estive. Je rattrape, photographie, me fait à nouveau distancer. Pied dans une tourbe, une chaussure trempée.
C’est magnifique, on est au milieu de la nature, montagnes au loin, un autre monde !
La marche, ça fait du bien. Je suis bien.

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Dimanche 29 mai. ©Alain Keler.


Mardi 31 mai 2022


La Chaumette, Haute-Loire. RDV avec Anaïs. Elle est technico commerciale, vend et assure des suivis et conseils techniques de produits naturels pour le travail du sol. C’est par le cousin de Claude, la femme de mon plus vieux copain Henri que j’ai eu ce contact. On a rendez-vous avec Pierre C., 26 ans, exploitant agricole, 70 hectares, 110 à 120 bêtes, viande et veaux de boucherie (veaux sous la mère), c’est comme ça que l’on dit. Il est seul à travailler dans l’exploitation.
Anaïs est super pro et très sympa, jeune comme l’exploitant photographié.
Murat : chambre d’hôte pour touriste.
Demain je dois photographier un producteur de fromage (entre autre le goûteux Salers) et un thé dansant, finalement annulé faute de participants.

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Mardi 31 mai. ©Alain Keler.

 

JUIN 2022

Mercredi 1er juin 2022


Alain André, fromager à Murat. Pas de problème, l’homme est un grand professionnel. Je lui achète de son fromage. Je photographie aussi une jeune stagiaire. Plus tard je demanderai à sa mère l’autorisation d’utiliser sa photo. Envoi du formulaire BNF et demande. Jamais de réponse. Il faut dire que faire remplir des formulaires aussi longs effraie plus qu’autre chose et casse l’atmosphère avec la personne photographiée. Dans ce cas la mère à distance.
Murat vers le Plomb du Cantal, Puy Mary, Pas de Peyrol. Tout est magnifique. Je joue le touriste, roule beaucoup. D’Aurillac il y a la petite route des Crêtes qui se faufile entre les montagnes. Un petit arrêt à Saint Simon, où se sont cachés mes parents pendant la guerre, fuyant Clermont où ils avaient été dénoncés comme juifs. Je me souviens avoir entendu ma mère dire que mon père se faisait payer en cigarettes en échange des sacs à main qu’ils faisaient ensemble. Là, je pense que ma mère exagérait un petit peu. Quoique j’ai un souvenir de jeunesse à Clermont et à Paris d’un homme qui clopait beaucoup. Et lorsqu’il a arrêté, il a compensé avec des chewing gum.  
Tout est magnifique dans le Cantal, les gens, les vaches (j’adore les vaches, elles me font beaucoup rire), le fromage, la nature. C’est presque le jardin d’Éden, le paradis terrestre biblique créé par Dieu pour être habité par sa première création humaine.
Petit Bémol : je ne crois pas une minute à tous ces charlatanismes, mais la comparaison est tentante avec la mythologie. C’est dommage que de nos jours des hommes remettent ça au goût du jour !
Je m’offre une petite pause, une journée repos comme pendant le tour de France. Je prends la route du Mas Bonnet, en Ardèche où sont Christine, Léo mon fils, bientôt rejoint par Louise, sa copine talentueuse. Je n’y étais pas allé depuis vingt-trois ans. Étrange retour en arrière sur un pan de mon histoire. Comme le temps passe vite. Un brin de nostalgie.

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Fromagerie. Mercredi 1er juin. ©Alain Keler.


Jeudi 2 juin 2022


Toujours le Mas Bonnet à Gravières. Visite d’Isabelle, qui habite à quelques kilomètres.


Lundi 6 juin 2022


Super Besse, bref arrêt dans cette station de sports d’hiver moderne, comme un furoncle sur un beau visage. Heureusement qu’il y a cette tyrolienne, câble étrange de 1600 mètres de long. Une belle photo d’un homme et d’un enfant de dos regardant au loin vers un avenir que l’on n’arrive pas bien à définir, perturbé par cette apparition incongrue d’un homme sur ce câble comme filant vers un mur où il va s’écraser. Enfin non, comme dans les contes de fées, tout est bien qui finit bien.
Saint Nectaire, arrêt fromage.
Puis la route vers Paris, mon chez-moi, refuge du photographe avec toujours un petit bout de son cœur dans son Auvergne natale.
Fin du quatrième voyage.

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Tyrolienne. Lundi 6 juin. ©Alain Keler.

 

JUILLET 2022

Mercredi 13 juillet 2022

Cinquième voyage


Ça sent la fin du voyage. Les idées se font rares. J’ai tenu absolument à prendre le petit train qui monte au sommet du Puy-de-Dôme. Je n’y étais jamais retourné depuis mon enfance où je faisais de la luge en hiver sous la surveillance du Docteur Veisleb, un grand ami de mes parents. Je devais avoir cinq ou six ans. Il avait deux filles, Colette et Monique, et je pense que je représentais un peu le fils qu’il n’avait pas eu.
 C’était Chamalières, et une sorte de douceur de vivre pour nos parents et leurs amis après la guerre et les épreuves qu’ils subirent tous, juifs ashkénazes rescapés, cachés, en fuite.
Aujourd’hui, au sommet, les parapentes ont remplacé les boules de neige, les luges, au moins en été.
Je fais le touriste, mais mal. En fait je ne sais pas faire le touriste, je m’embête copieusement. Je dois avoir tout le temps ma bouée de sauvetage, un appareil photo, qui est là pour me rappeler qui je suis. Un photographe ne peut pas être un touriste, il restera photographe toute sa vie, au moins tant que ses jambes le porteront.
Pour clore le chapitre « Histoire-Géographie », je décide d’aller ensuite sur le plateau de Gergovie, lieu qui vit la victoire de Vercingétorix sur César, tous deux éminents ancêtres d’ Astérix et Cie. C’est un chapitre de l’histoire de La Gaule.
Mais mon GPS ne l’entend pas de cette manière. Il a enregistré le lieu non comme un lieu précis, mais comme un site, ou le contraire, il m’a embrouillé grave. Venant du pied du Puy-de-Dôme, le voyage aurait dû être assez rapide. Mais il n’en fut rien. J’ai presque fait le tour de l’Auvergne (enfin j’exagère un peu), si bien que j’ai dû reprendre une bonne vieille carte routière pour retrouver mon chemin. Pourtant on voit de très loin le monument commémoratif qui domine les alentours de Clermont avec un casque sans doute similaire à celui de Vercingétorix.
D’après Wikipédia, "Le siège de Gergovie, en 52 av. J.-C., est une des batailles principales de la guerre des Gaules. Elle vit les forces gauloises rassemblées sous la conduite de Vercingétorix repousser victorieusement les assauts des légions romaines de Jules César, qui assiégeaient l’oppidum de Gergovie, à proximité de la cité arverne de Nemossos".


 Il y a aussi Henri Salvador pour chanter « Faut rigoler » :
Faut rigoler
Faut rigoler
Avant que le ciel nous tomb’ sur la tête
Faut rigoler
Pour empêcher le ciel de tomber
Nos ancêtres les Gaulois
Cheveux blonds et têtes de bois
Longues moustaches et gros dadas
Ne connaissaient que ce refrain-là…


On ne voit pas grand-chose sur le site de la bataille de Gergovie, des amoncellements de pierres rangées le long des chemins, un musée, le monument coiffé d’un casque de gaulois, peu de monde, ce qui ne m’étonne pas vu la difficulté d’accéder au site, ou plutôt du manque d’informations pour y arriver.
Il fait très chaud. Je m’assois sous un arbre à côté d’une petite boutique où j’ai acheté une bouteille d’eau. Je suis bien. Fatigué mais finalement bien dans ma tête, le devoir accompli d’être arrivé finalement à bon port. Sous l’arbre il fait doux. Je pourrais presque dormir !

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Mercredi 13 juillet. ©Alain Keler.


Jeudi 14 juillet 2022

Matin.
Saint-Éloy-les-Mines pour la cérémonie de la fête nationale. Des anciens combattants, un démineur de la marine nationale à la retraite, un très jeune maire Mr Anthony Palermo déjà rencontré il y a 2-3 mois, qui fera le discours et qui déposera une gerbe. Pas trop de monde comme spectateurs mais suffisamment pour le photographe que je suis, une lumière épouvantable, presque au zénith, une courte cérémonie suivie d’un vin d’honneur dans un café de la rue principale de Saint-Eloy, la télé allumée transmettant la cérémonie des Champs-Élysées à Paris avec le Président comme spectateur principal.
Toujours plongé dans mes souvenirs de jeunesse, je me dirige ensuite vers Saint-Pourcain sur Sioule. Une terrasse ombragée, une omelette bien baveuse aux champignons comme repas.

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Jeudi 14 juillet. ©Alain Keler.


Vendredi 15 juillet 2022


Cap sur le sud. Le tour de France doit relier demain Saint-Étienne à Mende, avec un passage en Haute-Loire, et plus précisément à Sainte Sigolène, déjà visitée au mois d’avril pour la procession des pénitents blancs. Le tour étant une véritable institution, je me dois d’aller le voir lors de  son passage en Auvergne. C’est une traversée de Nord au Sud de la province, par des routes de moindre importance avec des villes aux noms autrefois familiers, Thiers, Ambert, qui m’y mènera.
En bifurquant vers Craponne, je prends un raccourci qui me mènera vers Monistrol-Sur Loire, ma ville étape de ce soir. En traversant le petit village de Dore l’Église, je suis bloqué par un troupeau de vaches qui sort d’une étable donnant sur la rue principale. De ma voiture je fais une photo, puis une discussion s’engage avec le paysan. Je le rejoins sur le pré où il emmène ses vaches, puis il m’invite à aller dans cette étable qui m’intrigue.
Je pense qu’il est content de parler à un étranger. Son étable semble sortie d’un film d’avant-guerre, où les odeurs me rappellent celles de mon enfance du côté de Montmazot, ce côté authentique d’avant toutes les régulations votées au fil du temps, des décisions prises par les politiques, bonnes ou mauvaises.
Sa salle à manger semble être l’unique pièce à vivre de sa petite maison. C’est un grand bazar avec des journaux étalés un peu partout, des prospectus, du courrier, des cartons empilés les uns sur les autres. Une horloge à l’ancienne trône contre un mur.  Elle semble être la maitresse du lieu et de son temps, avec son tic-tac rompant le silence qui règne dans cette pièce.
Philippe a cinquante-six ans. Il retire sa casquette, sans doute par coquetterie. Sa chemise a des rayures verticales et ressemble aux vêtements des prisonniers. Je pense tout d’abord aux camps de concentration, mais je suppose que c’est la même chose dans tous les lieux où les hommes sont retenus contre leur gré.
Il me fait confiance en me racontant sa vie. Il ne doit pas rencontrer beaucoup de monde. Il est agriculteur depuis son plus jeune âge, a quitté l’école en juin 1983. Je ne lui demande rien. Il parle. Il a été à l’école d’agriculture d’Ambert de septembre 81 à juin 83, n’a quasiment pas quitté la région à l’exception d’un voyage au salon de l’agriculture avec l’école trois jours en mars 1983. C’est son seul voyage à Paris. Supporter du club de foot de l’AS Saint-Étienne, à quatre-vingts kilomètres, il allait souvent voir les matches de son équipe préférée dans les années 90. Il ne s’est jamais marié, sa mère ayant opposé un véto à sa prétendante pour un supposé problème de santé.
Je lui dis que je vais lui donner les photos prises aujourd’hui. Il me demande si je vais le faire payer.
Il a repris l’exploitation de ses parents le 1er janvier 1987, d’abord avec l’aide de son père, qui décèdera quelques années plus tard, puis de sa mère.
Je retournerai le voir, avec les photos. Gratuites !
J’ai essayé de lui téléphoner récemment. Il y a une annonce bizarre de la compagnie de téléphone. Il m’avait dit qu’il avait un problème avec sa ligne.
Arrivé dans mon hôtel à Minestrol, je demande à des personnes au comptoir du bar s’ils savent où sont les meilleurs endroits pour voir passer demain le tour de France. Je veux faire du repérage. On me conseille une route sinueuse après Sainte Sigolène.
Des caravanes occupent déjà les meilleurs endroits, dans des virages sur une montée sévère, comme on les aime sur le tour. Tables de camping étalées, chaises sorties, chiens aboyant, tout l’espace est déjà occupé par des habitués du tour. Demain, le jour de l’étape je n’aurai aucune chance de pouvoir m’installer. Mon choix sera à Sainte Sigolène pour trouver des spectateurs, avant et pendant le passage des coureurs.

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Vendredi 15 juillet. ©Alain Keler.

Samedi 16 juillet 2022


Je quitte mon hôtel avant la fermeture des routes prévue à dix heures. Dans le centre de Sainte Sigolène, il y a déjà un peu de monde. Vers 11 heures la caravane passe, précédant les coureurs de deux heures.  Devant des boutiques de la rue principale, des spectateurs assis sur des fauteuils de camping alternant avec des curieux debout, amusés par le photographe qui passe et repasse dans cette rue en les photographiant. Bref moment de célébrité. C’est bon enfant.
Devant le bar El Mambo, cannettes et autres consommations à la main, visages interrogateurs au passage de la caravane, une trentaine de jeunes et moins jeunes entament leur journée gaiement. La caravane passe vite, haut-parleurs hurlants. Un homme venu avec un parapluie ouvert intercepte des objets publicitaires lancés depuis un camion. Il doit être expérimenté car il fait mouche à chaque fois.
À la sortie du village un petit groupe attire mon attention : jeunes, moins jeunes, chapeaux et bobs sur la tête pour se protéger d’un soleil violent, un drapeau tricolore au centre de cette chorégraphie spontanée.
Je ne regarde plus le tour de France depuis des années. Autrefois il y avait des coureurs français qui déchainaient les passions des spectateurs. Dans ma première jeunesse, j’écoutais à la radio les commentaires de Georges Briquet du fond de mon Auvergne profonde, ou du Limousin où j’allais aussi en vacances. J’étais un petit garçon et l’unique chaîne de télévision ne couvrait pas encore toute la France.
À Clermont, nous avions Raphaël Geminiani. C’était un peu notre idole à nous les jeunes auvergnats. C’était il y a longtemps !


Avant une si longue absence.

 

FIN

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Samedi 16 juillet. ©Alain Keler.

 

 

 


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Extrait du Journal de bord d'Alain Keler édité. ©Alain Keler.
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Extrait du Journal de bord d'Alain Keler édité. ©Alain Keler.
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Extrait du Journal de bord d'Alain Keler édité. ©Alain Keler.
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Extrait du Journal de bord d'Alain Keler édité. ©Alain Keler.

 

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Extrait du Journal de bord d'Alain Keler édité. ©Alain Keler.
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Extrait du Journal de bord d'Alain Keler édité. ©Alain Keler.
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Extrait du Journal de bord d'Alain Keler édité. ©Alain Keler.