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Territoire : Hauts-de-France
Alors que les nouvelles licences de pêche imposées par les autorités britanniques cristallisent toutes les tensions, Philippe Brault est parti à la rencontre des marins pêcheurs du Pas-de-Calais. « Il y a encore quelques années, des bateaux comme celui-là [le Don Lubi II] faisaient vivre les familles de tout l’équipage avec des salaires décents. Depuis le Brexit et l’obligation d’une licence pour travailler dans les eaux britanniques, c’est devenu impossible. Aujourd’hui, sur les cent vingt bateaux du port de Boulogne-sur-Mer, seuls vingt-deux ont obtenu le sésame. Il y a de gros senneurs qui pêchent juste en face de notre port. Normalement, ces bateaux sont faits pour le large, ils sont énormes. Avec leur technique, ils ratissent et détruisent le fond de la mer. »
Né en France en 1965. Vit à Cachan. C’est à l’armée en 1989 que Philippe Brault trouve sa vocation. Il séjourne six mois au Liban pendant la guerre civile, puis développe pour la presse un travail documentaire sur les violences politiques, économiques, sociales, sanitaires ou climatiques faites aux civils à travers le monde. En 2010, il se lance dans des productions multimédia et produit Prison Valley et Fort McMoney. Il a reçu de nombreux prix comme le World Press Photo ou le Visa d’or. Il est membre de l’agence Vu’.
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Journal de bord
MARS 2022
Boulogne-sur-Mer, 14 mars 2022, 2h du matin.
Me voici en mer, avec Christophe Marcq et son équipage.
Boulogne-sur-Mer, 14 mars 2022, 19h.
Capécure est désert. Dans quelques heures, la cité industrielle de Boulogne-sur-Mer, dont les immenses allées vivent au rythme de la pêche, s’agitera à nouveau, parmi les grues, les dockers, son vacarme de caisses chargées et déchargées et ses goélands aux cris perçants.
Boulogne-sur-Mer, 15 mars 2022, 11h du matin, retour au port.
« Il y a encore quelques années, des bateaux comme celui-là faisaient vivre les familles de tout l’équipage avec des salaires décents. Depuis le Brexit et l’obligation d’une licence pour travailler dans les eaux britanniques, c’est devenu impossible. Aujourd’hui, sur les 120 bateaux du port de Boulogne-sur-Mer, seuls 22 ont obtenu le sésame (…) Il y a de gros senneurs qui pêchent juste en face de notre port. Normalement, ces bateaux sont faits pour le large, ils sont énormes, beaucoup plus gros que les nôtres. Avec leur technique, ils ratissent et détruisent le fond de la mer ».
AVRIL 2022
Le 28 avril dans la nuit
Nous avons quitté le quai Gambetta de Boulogne-sur-Mer. Christophe, capitaine du « Don Lubi II », m’apprend qu’il vient enfin d’obtenir sa licence l’autorisant à venir pêcher dans les eaux anglaises. Un immense soulagement après plusieurs mois d’attente. La pêche artisanale des marins boulonnais dépend toujours à plus de 70 % des eaux britanniques.
Stephen, le plus jeune de l’équipage, à l’aube. Alors que nous croisons au large de l’Angleterre, le soleil vient percer la brume.
Ce jour-là, la pêche n’aura pas été suffisante pour couvrir tous les frais. Olivier évoque les gros senneurs qui pêchent de plus en plus proche des côtes : « Normalement, ces bateaux sont faits pour grand large, ils sont énormes, beaucoup plus gros que les nôtres. Avec leur technique, ils ratissent et détruisent le fond de la mer. À cause de ça, notre métier d’artisan-pêcheur est en train de mourir.
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